À la défense de l’équité, la diversité et l’inclusion

RCI / [Entrevue] / Samir Bendjafer

Le concept de politiques EDI (Équité, Diversité et Inclusion) subit ces derniers temps des attaques répétées aux États-Unis et même au Canada, selon Allen Alexandre, fondateur et directeur général du Centre culturel afro-canadien de Montréal (CCAM).

Cet ancien conseiller politique au ministère fédéral de la Diversité et de l’Inclusion, entre autres, a publié dans plusieurs médias une tribune où il met en garde contre l’idée naïve que le Canada serait à l’abri de ce courant idéologique américain qui possède un potentiel réel d’affecter notre vivre-ensemble.

Il énumère plusieurs exemples de ces assauts, dont ceux d’Elon Musk, le célèbre parton de X (anciennement Twitter), qui avait écrit sur son réseau social en décembre dernier : L’Équité, Diversité et InclusionEDI doit mourir. Il s’agit de mettre fin à la discrimination et non de la remplacer par une autre discrimination.

Musk faisait référence au concept de discrimination positive qui fait partie des politiques d’Équité, Diversité et InclusionEDI que peuvent implémenter les compagnies ou les administrations au sein de leurs équipes.

Allen Alexandre, fondateur et directeur général du Centre culturel afro-canadien de Montréal (CCAM)
Photo : Gracieuseté : Centre culturel afro-canadien de Montréal

Équité, Diversité et Inclusion (EDI)

Ensemble de programmes, politiques, stratégies et pratiques qui visent à favoriser une culture de respect au sein d’une organisation afin d’offrir à toutes les personnes, quelles que soient leur identité et leurs différences, un environnement sain, équitable et inclusif, exempt de toute forme de discrimination.

En entrevue avec Radio Canada International, Allen Alexandre rappelle le tollé soulevé en mars 2022 par une décision d’une université canadienne relative aux politiques EDI.

L’Université Laval, à Québec, avait donné la priorité aux personnes racisées, aux femmes, aux Autochtones et aux personnes vivant en situation de handicap lors un processus de recrutement de chercheurs.

Il y a certains groupes qui pensaient que c’est une discrimination envers eux…on parle d’hommes blancs qui trouvaient que c’est une discrimination à leur égard, ajoute cet entrepreneur social.

Il reconnaît que l’ampleur des attaques contre les politiques d’Équité, Diversité et InclusionEDI aux États-Unis est sans commune mesure avec celles enregistrées au Canada.

Mais Allen Alexandre pense que l’enjeu est plus une question de possibilité que d’ampleur.

En 2017, quand il y a eu la fusillade de [la mosquée de Québec]. Si j’avais parié la veille avec n’importe qui au Québec ou au Canada que quelque chose comme ça pouvait arriver au Québec, la réponse aurait été catégorique et on aurait dit que ça ne pourrait jamais arriver, explique le directeur général du Centre culturel afro-canadien de MontréalCCAM.

Ce dernier met en garde contre le retour du balancier et appelle à ne pas se reposer sur ses lauriers en tenant pour acquis les progrès réalisés.

Des études ont démontré que les organisations où l’on priorise l’équité, la diversité et l’inclusion performent mieux que les autres, selon Allen Alexandre, directeur général du Centre culturel afro-canadien de Montréal (CCAM).
Photo : Jean-Pierre Perouma

L’Équité, Diversité et InclusionEDI est bonne pour les affaires

Le directeur général du Centre culturel afro-canadien de Montréal est revenu aussi sur les déclarations de Chip Wilson, fondateur de Lululemon, compagnie canadienne spécialisée en vêtements de sport.

Ce dernier, qui ne dirige plus l’entreprise vancouvéroise, s’est dit dégoûté par toute la diversité et l’inclusion de Lululemon.

[Pour l’ancien dirigeant de Lululemon,] les pratiques et les politiques d’Équité, Diversité et InclusionEDI affaiblissent, au fond, les institutions, estime Allen Alexandre.

Or, les chiffres des études qui ont été effectuées pendant des années démontrent clairement que les organisations qui sont les plus diversifiées où l’on priorise l’équité, la diversité et l’inclusion, performent mieux que les autres, indique M. Alexandre.

Il cite une étude menée en 2016 par la firme Deloitte, qui a trouvé que les entreprises très inclusives étaient plus susceptibles d’avoir affiché une augmentation de leurs revenus au cours de la dernière année que les entreprises peu inclusives. Elles étaient en outre plus susceptibles d’avoir enregistré une hausse marquée de leurs bénéfices (19 % contre 6 %). Les entreprises peu inclusives avaient quant à elles plus de chances que leurs homologues de voir leurs revenus diminuer.

Pour protéger l’Équité, Diversité et InclusionEDI des assauts qu’elle subit, Allen Alexandre n’irait pas jusqu’à imposer cette dernière par la loi, mais plutôt encourager les pratiques qui y sont associées comme les quotas ou le recrutement à l’aveugle adoptées par le gouvernement fédéral.

1. Alexandre ajoute qu’il ne serait pas contre l’idée de voir une approche qui est plus systématique, tant sur le plan institutionnel que sur le plan organisationnel et même gouvernemental, d’aller vers des pratiques qui codifieraient même dans les pratiques de ressources humaines qui pourraient inciter les gens à adopter des politiques d’Équité, Diversité et InclusionEDI.

Ce reportage est également disponible en arabe

Samir Bendjafer